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ALTERNANCE POLITIQUE ET PARTICIPATION CITOYENNE EN ALGÉRIE: entre un potentiel démographique et inertie sociopolitique

Temps de lecture : 3 minutes

Ahmed Ouared 

entre potentiel démographique et inertie sociopolitique.

Sommes-nous en droit de nous poser la question sur l’alternance politique en Algérie et en particulier de l’implication des jeunes dans ce processus qui nous renvoie à plusieurs dimensions simultanées: institutionnelle, sociologique et culturelle.

Elle ne peut être examinée uniquement sous l’angle du système politique, car elle engage aussi la manière dont la société perçoit l’engagement public, la responsabilité collective et l’avenir commun.

1. Un contexte institutionnel marqué par la continuité.

L’Algérie est caractérisée par une continuité du personnel politique et administratif depuis plusieurs décennies.
Cette stabilité apparente s’explique par des mécanismes de sélection et de reproduction des élites qui favorisent les réseaux d’allégeance, l’ancienneté dans les appareils et la loyauté au système existant, au détriment du renouvellement générationnel.

Ce mode de fonctionnement limite l’accès des jeunes à la décision publique. Leur présence, lorsqu’elle existe, est souvent symbolique, encadrée ou instrumentalisée à des fins d’image plutôt qu’à des fins de participation réelle.

2. Une jeunesse majoritaire démographiquement, mais minoritaire politiquement.

Les jeunes représentent plus de la moitié de la population, mais leur implication politique demeure faible. Cette situation résulte d’une combinaison de facteurs:

Méfiance envers les institutions
Dévalorisation de la politique, perçue comme un espace corrompu ou inefficace
Absence de formation civique et de culture du débat
Priorité donnée aux enjeux socio-économiques immédiats (emploi, logement, mobilité)

La conséquence directe de cette distanciation est paradoxale: une population jeune, souvent critique, mais peu présente dans les espaces où se fabriquent les décisions.

3. Responsabilité partagée: État et société.

Il serait simpliste d’attribuer l’absence d’alternance uniquement aux dispositifs de contrôle politique. La société elle-même a progressivement intégré l’idée que la politique est un domaine à éviter.
La résignation, le scepticisme et la passivité sont devenus des attitudes collectives largement répandues.

Ce retrait social laisse un vide. Dans tout système politique, le pouvoir ne demeure jamais seul: il se consolide parce que le reste de la société ne s’organise pas pour proposer des alternatives structurées.

4. Conditions d’une alternance possible.

L’alternance n’est pas un événement ponctuel. Elle est un processus. Elle suppose trois éléments fondamentaux:

1. Formation d’une nouvelle élite compétente en administration, en économie et en gestion publique.

2. Émergence de mouvements organisés, capables de structurer des revendications et de proposer des programmes cohérents.

3. Réhabilitation de la politique comme espace légitime du bien commun, et non comme simple lieu de pouvoir.

5. Le rôle des partis politiques

Les partis politiques devraient représenter les citoyens et animer le débat public. Pourtant, leur inertie actuelle se traduit par un manque de présence sur le terrain, peu d’idées nouvelles et une faible capacité à mobiliser. Leur présence est souvent limitée aux échéances électorales sans travail continu auprès de la population. Cette distance avec la société affaiblit leur rôle et creuse le fossé entre population et vie politique. Pour redevenir utiles, ils doivent se réengager, écouter et reconstruire la confiance.

Sans ces conditions, la demande de changement demeure symbolique, émotionnelle ou conjoncturelle, sans débouché durable.

En Conclusion:

L’alternance politique en Algérie est possible, mais elle dépend moins d’un changement soudain du système que d’une transformation progressive de la culture politique et civique.
Le principal moteur d’un renouvellement politique réside dans la capacité des jeunes à considérer l’engagement public non comme une source de discrédit, mais comme un outil d’action collective et organisée.

Tant que la majorité de la société restera spectatrice, la continuité prévaudra.

Le jour où l’engagement deviendra un choix assumé, structuré et durable, l’alternance cessera d’être un horizon lointain pour devenir une étape naturelle de la vie politique nationale.

Ahmed OUARED

Ahmed Ouared

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