Jil Jadid Santé. Dans cette contribution du Conseil Scientifique de Jil Jadid, le Docteur Ibrahim Choual membre de la Commission Santé aborde la pandémie de Covid-19 et les avancées en terme de recherches pour l’élaboration d’un vaccin. Les étapes jusqu’à obtenir l’autorisation de mise sur marché sont un défi pour les chercheurs et industriels à travers le monde. Toutefois, une fois le vaccin mis sur le marché, des campagnes de vaccination se révèlent êtres aussi un défi et notamment en Algérie où des conditions de bon déroulement garantiront la réussite.
En décembre 2019 le monde a constaté l’émergence d’une nouvelle maladie, la COVID-19, due à un nouveau coronavirus SARS-CoV-2. Ayant pour point de départ, la ville de Wuhan en Chine, l’épidémie de COVID-19 s’est répandue en quelques semaines en Chine puis sur tous les continents, avec 188 pays touchés, conduisant à une pandémie mondiale déclarée par l’OMS le 11 mars 2020.
Au niveau mondial, au 14 Novembre 2020, nous comptons 53,927,462 cas confirmés et recensés depuis le 31 décembre 2019, dont 65,975 en Algérie et 1,312,340 personnes sont décédées dans le monde, dont 2,124 en Algérie.
Le consensus scientifique mondial s’accorde à dire que les vaccins sauvent des millions de vies chaque année. Leur mode d’action consiste à entraîner et à préparer le système immunitaire (défenses naturelles de l’organisme) à reconnaître et à combattre les virus et les bactéries qu’ils ciblent. Ainsi, si l’organisme se trouve par la suite exposé à ces mêmes agents pathogènes, il est prêt à les détruire, ce qui permet de prévenir la maladie.
Le terme « vaccinologie » a été créé en 1976 par Jonas Salk (1914-1995)(figure 2), pour désigner une branche de médecine de santé publique consacrée aux vaccins (avec le statut de médicament) et à la vaccination (action d’immunisation préventive).
Chaque année, la vaccination permet d’éviter 2 à 3 millions de décès dus à des maladies comme la diphtérie, le tétanos, la coqueluche, la grippe et la rougeole. Il existe aujourd’hui des vaccins pour prévenir plus de 20 maladies potentiellement mortelles.
La vaccinologie est pluridisciplinaire avec un double aspect : biomédical et politique (de santé publique) les deux sont importants dans le contexte algérien.
Plusieurs branches de médecine contribuent à cette branche qu’on appelle « vaccinologie » :
La politique vaccinale est une politique de santé publique qui comprend :
Elle comprend surtout l’application de la politique de santé publique (couverture vaccinale, surveillance des effets secondaires ou pharmacovigilance, rapport bénéfices/risques, suivi épidémiologique de l’efficacité vaccinale et de l’immunité collective…).
La dimension économique de la vaccinologie est celle de l’activité économique liée aux vaccins : le coût recherche et développement d’un vaccin qui est comparé au coût de la maladie infectieuse évitable, mais aussi de gestion budgétaire (limitation ou contrôle des dépenses d’un système de santé).
Sont représentées par les problèmes posés par l’obligation vaccinale et les droits individuels (information, liberté de choix…), les résistances et les oppositions aux vaccinations, les problèmes de communication et de gestion de crise face à des rumeurs, des idées complotistes et des évènements surmédiatisés.
Depuis la flambée de la pandémie, les laboratoires du monde entier sont sur le pied de guerre pour mettre au point le plus rapidement possible un vaccin. Des travaux sont actuellement menés à un rythme sans précédent pour faire également de la COVID-19 une maladie évitable par la vaccination (figure 2).
Près de 200 équipes de recherche à travers le monde planchent actuellement sur l’élaboration d’un vaccin contre le SARS-CoV-2. Selon les dernières données disponibles (figure 3) en date du 9 novembre 2020, 18 laboratoires sont arrivés à la deuxième phase des essais cliniques et 11 projets ont atteint la troisième phase, c’est à dire les essais à grande échelle.
La fabrication d’un nouveau vaccin est un processus long et complexe qui nécessite plusieurs phases de recherche et de tests afin de garantir son efficacité et son innocuité. En temps normal, il faut compter plusieurs années, de dix à quinze ans, entre le début des études et la commercialisation d’un vaccin. Mais face à une situation d’urgence, telle que le contexte actuel de pandémie, les différentes phases de développement sont menées en parallèle afin d’accélérer au maximum la mise à disposition du vaccin.
La première phase de développement correspond aux essais précliniques, étape où le vaccin est d’abord étudié en laboratoire puis généralement testé sur des animaux de laboratoire. Cette étape permet d’évaluer la capacité de l’antigène à produire des anticorps dans un organisme vivant, mais ne préjuge pas des résultats chez l’homme. Viennent ensuite les essais cliniques, c’est à dire les tests sur l’homme, organisés en trois phases successives. La phase I a principalement pour objectif de déterminer l’innocuité du vaccin et d’observer la réponse immunitaire induite, tandis que la phase II cherche à établir le dosage optimal et à prouver la durabilité de la protection. Lors de la phase III, les essais portent sur des groupes composés de centaines voire milliers de personnes et ont pour but de définir le rapport bénéfices/risques du vaccin afin d’obtenir l’autorisation de mise sur le marché.
Un vaccin contre la COVID-19 en 2021 ? Cette hypothèse semble de plus en plus réaliste depuis l’annonce du géant pharmaceutique américain Pfizer et la biotech allemande BioNTech : ils viennent en effet d’annoncer des résultats préliminaires positifs dans leur essai clinique de phase III.
Selon leurs premières données, analysées après que 94 participants sur les 43.500 de la cohorte ont été contaminés par la COVID-19, leur candidat vaccin serait « efficace » à 90%. Sur cette base, les deux laboratoires comptent demander d’ici deux semaines, probablement, une autorisation temporaire d’utilisation à la FDA, l’agence sanitaire américaine.
Pour ne pas perdre de temps lorsque les vaccins anti-COVID seront prêts à être distribués (après avoir obtenu les autorisations nationales pour tout vaccin d’où il vient et quelques soit le nombre ou le rang des pays qui l’ont autorisé), une stratégie basée sur les axes suivants :
L’accès universel et équitable à la vaccination dans un contexte où la disponibilité progressive des doses de vaccin pourrait imposer des choix quant aux populations à vacciner en priorité.
Les populations suivantes, constituent une priorité en matière de vaccination :
Maladies cardiovasculaires hypertension artérielle compliquée, accident vasculaire cérébral, coronaropathie, antécédents de chirurgie cardiaque, insuffisance cardiaque stade NYHA III ou IV
Diabète (diabétiques insulinodépendants non équilibrés ou présentant des complications secondaires à leur pathologie)
Maladies chroniques respiratoires (asthme, mucoviscidose…)
Insuffisance rénale chronique
Cancers, les cancéreux sont les grands oubliés de cette crise en Algérie
Cirrhose au stade B au moins
Obésité morbide (IMC supérieur à 40kg/m²)
La nécessité de recourir à la vaccination dépendra des caractéristiques des vaccins et notamment de la durée de protection conférée par ce vaccin, de la protection conférée vis-à-vis d’autres coronavirus ou variants et de facteurs liés à la prévision de l’épidémie (existence d’une saisonnalité ; capacité de mutation du virus à plus ou moins long terme, état de l’épidémie à l’étranger).
Pour mettre fin à la pandémie, les systèmes de santé doivent vacciner entre 50 et 75% de la population mondiale.
Une coopération internationale entre gouvernements est nécessaire de toute urgence pour projeter la demande et planifier les capacités nécessaires pour produire des quantités suffisantes d’un futur vaccin qui se révélera efficace.
Une fois définies les populations cibles de la vaccination, la campagne de vaccination doit être réalisée auprès des personnes concernées. Les professionnels de santé sont à privilégier pour réussir une campagne de vaccination pertinente, efficiente et avec un haut niveau d’acceptabilité. Cela inclus les médecins généralistes, les infirmier(e)s, les pharmaciens. Les acteurs de la médecine du travail, de l’hôpital.
La vaccination « ambulatoire » dans les cabinets médicaux, les services et accès aux vaccins à l’hôpital pour les personnes à risque sont aussi à prévoir.
La mise en place d’un circuit vaccin est primordial afin d’assurer la traçabilité, pour assurer à la fois l’efficacité et la sécurité du vaccin.
Un « Warning » concernant la chaine du froid la conservation des vaccins dans des réfrigérateurs adaptés, toute altération de la chaine de froid du vaccin, entraine une baisse de son efficacité et probablement des effets secondaires.
Afin d’obtenir une adhésion complète de la population, il faut adopter un plan de communication transparent et clair. L’implication des sociétés savantes algériennes est un gage de transparence.
Pour les personnes ayant déjà été infectées par le SARS-CoV-2, la durée de la protection acquise après l’infection n’est pas encore connue, elle varie en fonction de différents paramètres tels que l’âge et la présentation clinique de l’infection.
Il n’y a pas d’arguments spécifique suggérant que la vaccination de personnes préalablement infectées pourrait poser problème. Elle est cependant de nature à prolonger ou renforcer l’immunité acquise.
La réalisation d’une sérologie préalable à la vaccination est inutile, au contraire, cela pourrait compromettre la bonne tenue de la campagne de vaccination.
La mise à disposition du vaccin sans reste en charge, est essentielle pour favoriser une mise en place effective de cette vaccination et limiter les freins économiques à son accès, sans condition d’âge ou de caractéristiques populationnelles.
Le schéma vaccinal doit être le plus simple possible. Si le vaccin est présenté en mono-dose les procédures classiques seront facilitées y compris devant l’exigence potentielle de deux injections espacées. Si le vaccin contre la COVID-19 est conditionné en multidoses (à priori 10 doses par flaconnage) un regroupement des patients et/ou une organisation sur les territoires est indispensable. La tenue d’un registre informatisé sera indispensable pour faciliter le suivi des injections de rappel.
Les vaccins sont des médicaments sensibles : leur fabrication fait appel à des matières premières d’origine biologique ainsi qu’à un processus complexe et soumis à variabilité. Leurs conditions de mise sur le marché sont renforcées via un processus de libération par une autorité nationale en plus du contrôle effectué de façon générale par l’industriel.
Le contrôle de libération de chaque lot par les autorités sanitaires, en parallèle du contrôle effectué par le fabricant, est une garantie supplémentaire de la sécurité des vaccins.
Ce dispositif de surveillance, qui devrait être coordonné par l’Agence Nationale des Produits Pharmaceutiques (ANPP), consiste à sensibiliser de façon proactive les professionnels de santé et le grand public à la déclaration des effets indésirables.
La saisie d’un signalement spécifique aux vaccins sur un portail numérique des signalements, ce portail sera géré au niveau régional par les DSP (Directions de Santé Publique) à travers le territoire national.
La mise en place d’indicateurs de suivi des cas d’effets indésirables enregistrés en région, avec une intégration de toutes ces remontées dans une Base Nationale de Pharmacovigilance (BNPV)
Si nécessaire, des études de pharmaco-épidémiologie complémentaires pourront être menées par la communauté scientifique nationale, il est temps de faire un peu de recherche clinique !
En conclusion, ce n’est pas la première fois dans l’histoire, que l’humanité est confrontée à une pandémie planétaire. De tous temps, la maladie, quelle qu’en soit la nature et les époques, accompagne l’homme avec son cortège de souffrances
De tels événements sont également souvent l’occasion de porter un regard nouveau sur le sens de l’humanité avec des conséquences parfois inédites (prévisibles ?) sur le plan, social, économique, sanitaire, politique avec certainement des leçons à en tirer. Chaque État concerné réagissant à sa manière et du mieux possible selon ses moyens et ressources propres.
Dans le cas Algérien, cette crise nous a rappelé malheureusement la vulnérabilité de notre système national de santé, et notre faiblesse scientifique avérée, aucun travail scientifique n’a été entrepris dans nos CHU et centres de recherches concernant a crise de la COVID-19, en 2020 c’est inacceptable !
Il est temps de provoquer une thérapie de choc a la hauteur de la gravité du moment, Jil Jadid, à travers la commission santé du Conseil Scientifique Jil Jadid, appelle à un sursaut scientifique et sanitaire, les enjeux sanitaires de demain sont nombreux et difficiles.
Deuxième partie : Une troisième voie ? Par Soufiane Djilali A l’ombre des questions sur la…
Première partie : Où en sommes-nous ? Par Soufiane Djilali Le multipartisme en Algérie a son…
À l’attention de Monsieur le Secrétaire général de la Présidence de la République En retour…
À l’attention de Monsieur le Secrétaire Général de la Présidence de la République Alger le…
Le Bulletin Économique du Conseil Scientifique de Jil Jadid pour le second semestre 2024, rédigé…
Réflexion 5 : Quelle souveraineté pour l’Algérie? Par: Soufiane Djilali Un problème bien posé…