CONTRIBUTION : Par Ahmed Ouared, Président de la Commission énergies renouvelables au Conseil Scientifique Jil Jadid
Les changements climatiques ont bouleversé le monde. La terre se réchauffe et nous en subissons durement, à divers échelles les conséquences de ce réchauffement. Mis devant le fait accompli, les grands de ce monde devaient prendre des décisions pour ralentir et freiner les excès de l’industrialisation à outrance dont l’homme s’est rendu responsable, par une exploitation excessive des énergies fossiles. Paradoxalement, l’apparition de nouvelles technologies ont permis le développement d’autres sources d’énergies dites renouvelables tels que le soleil, l’air, l’eau et le bois.
Chez nous, en Algérie, il est de notre droit de nous poser des questions sur le retard abyssal constaté pour développer les énergies renouvelables. Qu’attendent les responsables du secteur pour entreprendre des projets de grande envergure ? Qu’avons-nous réalisé pour nous permettre d’envisager sereinement un avenir énergétique sans avoir la boule au ventre en se disant que va-t-on faire une fois les réserves de pétrole et de gaz épuisées ?
Lors d’un entretien à la presse, le ministre chargé du secteur de l’énergie déclara que nos puits seront asséchés d’ici 2040 selon les réserves connues à ce jour. Cette annonce est passée presque inaperçue, certainement à cause de la crise sanitaire qui nous préoccupe tous, sauf que celle-ci a de quoi glacer le sang.
En attendant aléatoirement l’exploration et l’exploitation de nouveaux puits de pétrole et de gaz, l’Algérie dispose à peine de deux décennies de réserves en énergies fossiles.
Il est clair que nous courons droit vers la catastrophe si d’autres alternatives ne sont pas trouvées d’ici là car nous ne serons pas à mesure d’alimenter en électricité par exemple les hôpitaux en ces temps de pandémie et de maladies chroniques qui font des ravages dans la société algérienne.
Peut-on envisager de nos jours de vivre sans courant électrique ? La réponse est bien entendu non mais l’éventualité de voir un jour l’Algérie recourir à l’importation de l’électricité, le citoyen subir des délestages intempestifs et des coupures de courant fréquentes, n’est vraiment pas à écarter.
Nous déplorons cette légèreté et ces hésitations dans la prise de décisions car la réalité va rapidement nous rattraper et nous n’aurons pas le temps de réagir.
La raréfaction des énergies fossiles sur lesquelles s’est appuyé économiquement l’Algérie durant des décennies semble ne pas inquiéter outre mesure nos dirigeants. J’en veux pour preuve que peu de projets de grande d’envergure dits énergies renouvelables tels que le solaire photovoltaïque, le solaire thermique, l’isolation thermique ainsi que la thermodynamique ont vu le jour.
Le but de cette contribution n’est pas seulement de décrire une situation inquiétante mais de tirer la sonnette d’alarme de l’intolérable gaspillage de l’électricité et du gaz et leur utilisation anarchique que nous désapprouvons totalement surtout dans un pays qui ne dispose pas assez de ressources alternatives.
Comment peut-on se passer d’un aussi fort potentiel solaire (3650 hepp*/an) ? l’un des meilleurs au monde, pourquoi nous dilapidons nos richesses d’une façon ostentatoire et ne pas prendre des mesures drastiques pour économiser celles-ci ? qu’allons-nous laisser à nos enfants ? Pourquoi tout ce retard pour y mettre un terme ? Toutes ces questions nécessitent des réponses urgentes pour stopper cette frénétique consommation énergétique.
Pour toutes ces raisons, la commission des énergies renouvelables du conseil scientifique de Jil Jadid a développé un certain nombre de propositions et de recommandations qui contribuent à apporter des réponses concrètes dans le but de freiner le gaspillage des seules ressources que nous ayons et exploiter à bon escient les énergies renouvelables. Comme leur nom l’indique ces énergies sont inépuisables et économiques, elles sont la solution irréfutable pour une bonne transition énergétique si tant est qu’on ait la volonté de s’y mettre.et sérieusement.
Rappelons que sans une politique volontariste, ambitieuse et l’implication totale du citoyen ces propositions peuvent ne pas voir le jour :
Si nous voulons faire des économies d’énergies et atteindre l’efficacité énergétique, celles-ci doivent passer par les étapes suivantes :
L’isolation thermique permet de protéger de la chaleur en été et du froid en hiver. Une bonne isolation thermique limite les déperditions de calories et les échanges de chaleur. Plus besoin de pousser le chauffage (gaz, électrique, fioul…) et de monter la température des radiateurs en hiver, de réduire la facture énergétique jusqu’à 40%, de gagner entre 4 à 7°de température, améliorer le confort de chauffe et in fine, préserver le pouvoir d’achat.
Fig1-
Fig2-
UN MODE DE CHAUFFAGE OBSOLETE ET DANGEREUX
Les algériens, pour la plupart, se chauffent principalement avec des poêles à gaz. Ce mode de chauffage qu’ils entretiennent que très rarement fait l’objet de multiples controverses suite à leur dangerosité.
Sans entretien périodique des bruleurs, des thermocouples et autres accessoires ces poêles énergivores sont devenus obsolètes et dangereux à cause des émanations d’un gaz indolore qu’est le monoxyde de carbone qui fait des victimes tous les ans et décime des familles entières.
Fig3-
À ce titre, nous proposons le retrait progressif de ces appareils et leur remplacement par d’autres type de chauffage tels que les chaudières à condensation, les radiateurs à forte inertie, les pompes à chaleur AIR EAU pour les habitations alimentées en gaz naturel de ville.
Pour les immeubles collectifs nous recommandons des chaufferies centrales avec l’installation de radiateurs dans les appartements.
Ces changements de mode de chauffage à but économique seront financés par des participations mensuelles inclues dans le loyer de chaque locataire ou propriétaire.
Quant aux citoyens résidents dans les régions non pourvues de gaz naturel c’est malheureusement toujours la bonne vieille bouteille de gaz butane qui reste la seule planche de salut pour un confort de chauffe très spartiate. L’Etat est en mesure d’intervenir avec des aides financières à hauteur de 80% afin de permettre pour chaque famille l’installation d’un autre mode de chauffage tels que des radiateurs électriques à bains d’huiles, des convecteurs, radiateurs à panneaux rayonnants etc…
LA CLIMATISATION ou LA POMPE À CHALEUR AIR / AIR (réversible ou pas)
Lorsque l’on cherche à faire des économies de chauffage, l’installation d’une pompe à chaleur air/air ou d’une climatisation réversible peut s’avérer un véritable bon plan. Il s’agit également d’une démarche éco-responsable grâce à l’utilisation d’une énergie propre et renouvelable : l’air. Mais de quoi parle-t-on ? Comment choisir ? je vous résume la situation en 3 points.
Le principe est très simple : les calories de l’air extérieur sont captées pour être injectées à l’intérieur de l’habitation. On parle d’aérothermie.
Dans le détail, le module extérieur de la PAC air/air va concentrer les calories présentes dans l’air (même lorsqu’il fait froid). Ces dernières se mélangent avec le fluide frigorigène contenu dans le circuit de la PAC air/air. Celui-ci est ensuite compressé et sa température augmente progressivement et fini par libérer la chaleur en passant par un détendeur qui se dirige vers la/les unités intérieures de la pompe à chaleur air/air. Cela s’appelle le cycle thermodynamique.
Cette chaleur est alors redistribuée dans les pièces grâce à des ventilo-convecteurs (splits) ou unités intérieures qui soufflent l’air chaud ou l’air frais et inversement, la majorité des PAC air/air sont réversibles.
La différence entre une pompe à chaleur air/air réversible et climatisation réversible.
Sur le principe de fonctionnement, il n’y a aucune différence : les deux systèmes utilisent le même principe et le choix du matériel se portera selon l’usage souhaité. Il est donc est nécessaire de faire appel à un professionnel pour obtenir un conseil personnalisé et choisir un modèle à la performance énergétique adaptée.
Il est indispensable de faire installer votre pompe à chaleur air/air par un spécialiste. Seul un professionnel pourra vous guider dans le choix de l’équipement qui correspond parfaitement à votre situation. De plus, le fluide calorifère contenu dans le circuit est délicat à manipuler donc il est vivement conseillé de se rapprocher d’un spécialiste pour pouvoir bénéficier de conseils avisés, mais aussi d’une installation parfaitement réglée pour vous permettre le plus d’économie d’énergie possible.
Les performances en mode chauffage du matériel sont en règle générale de 1 kWh d’électricité consommée pour 3 kWh restituée (COP**). On réalise d’importantes économies d’énergie à condition que les normes d’installations soient scrupuleusement respectées afin d’éviter des sur ou sous-dimensionnements ce qui peut provoquer une faiblesse de rendement, un essoufflement rapide de votre appareil et un très grand gaspillage de l’électricité.
En Algérie, l’absence totale de réglementation quant à l’utilisation et la vente de ces appareils est vraiment à déplorer. L’anarchie qui règne dans ce secteur est un vecteur d’un très grand gaspillage énergétique. Par méconnaissance, les usagers achètent leur produit chez ‘’le quincailler du coin, au hasard, sans faire de calcul, sans aucune prévision ,en se laissant guider au jugé, ou conseiller par de pseudo-techniciens frigoristes.
On n’installe pas une clim dans chaque pièce sauf dans le cas d’une impossibilité technique, il existe des groupes extérieurs avec plusieurs sorties (Groupe extérieur + split).
On n’installe pas une clim dans chaque pièce sauf dans le cas d’une impossibilité technique
Fig4-
Nous regrettons vraiment l’absence des pouvoirs publics dans un secteur aussi crucial. Cette absence ne fait qu’accentuer le gaspillage et le laisser-aller. Par conséquent et au vu de la tournure que prend cette situation qui ne fait qu’empirer, la commission des énergies renouvelables du conseil scientifique de Jil Jadid recommande vivement aux dirigeants chargés des secteurs du commerce et de l’énergie de mettre un terme à ce désastre économique et écologique en mettant en place les mesures suivantes :
L’ALGERIE ET L’ENERGIE SOLAIRE
Plus grand pays d’Afrique, l’Algérie possède aussi le plus grand désert du continent donc de vastes espaces. Alors que les exportations du pays dépendent à près de 100% des hydrocarbures. L’Algérie semble tourner le dos à l’énergie solaire et hésite toujours sur la position à adopter vis-à-vis des énergies renouvelables. Malgré un gisement solaire classé deuxième mondialement. Annoncé en grandes pompes le projet TAFOUK 1 et 2 qui était censé produire 22 000 MW semble avoir pris du plomb dans l’aile. Un projet qui ne visait qu’à produire une énergie propre permettant un précieux apport en ressources financières susceptibles de se substituer à la rente pétrolière. Créer un mix de production d’électricité avec celle du gaz, d’économiser 93 millions de Tep à l’horizon 2030 et réduire les émissions des CO² à 193 millions de tonnes.
Il faut savoir que l’essentiel de l’électricité produite en Algérie va en majorité aux ménages 43%, le transport 36% et l’industrie 21%. Les subventions à l’énergie absorbent environ 30% du budget de l’Etat et 11% de son PIB (source B.M). D’année en année, les besoins en énergie du citoyen augmentent et les prix restent assez bas. Il faut savoir que le consommateur ne commence à payer son électricité qu’à partir du 125ème kWh à 1,779 DA / KWH (soit 0.014479 euro) et 4,179 DA le KWh au pallier au-dessus. Les subventions allouées s’élèvent à environ 3 à 4 milliards de dollars.
Effectivement, le monde change et nous le regardons faire. L’Algérie occupe actuellement la peu reluisante dix-huitième place (536 MW) en Afrique. Les autres pays qui ont décidé de jouer la carte de l’énergie propre en installant des milliers de mégawatts ayant leurs sources les énergies renouvelables.
Convaincus de l’importance d’une transition énergétique et écologique, la commission des énergies renouvelables du conseil scientifique de Jil Jadid exhorte les pouvoirs publics à prendre des mesures concrètes telles que :
‘’ Le désir de la réussite doit être plus grand que la peur de l’échec’’
*hepp : heures d’ensoleillement pleine puissance
** cop : coefficient de performance énergétique
Par Ahmed Ouared,
Membre du Conseil National de Jil Jadid
Président de la Commission Energies Renouvelables au Conseil Scientifique
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