Nom de pays masculin pluriel

Nom de pays masculin pluriel

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Pourtant, au tout début du « Hirak », la femme a été ce « carburant pacifique » qui a donné de l’énergie à tout un peuple à la recherche de sa liberté!

Qu’il est difficile d’évoquer les droits de la femme en Algérie !

Ce n’est pas seulement dans le machisme que la difficulté réside, mais bien dans le domaine du politique et principalement dans la nature même du régime. Car il serait naïf de croire qu’avec des mouvements féministes, les revendications des femmes aboutiront et rendront à notre « semblable» sa vraie place dans la société qu’elle porte en elle.

Au-delà des luttes juridiques, du combat des mentalités, il est une condition primordiale : c’est l’Etat de Droit qu’il faut imposer. La lutte des femmes est indissociable des Droits de l’Homme.

Le 08 Mars 1948 est la journée internationale de la femme. Cette dernière a lutté pour aboutir à son émancipation. Mais qu’en est-il de la femme Algérienne, sa journée étant réduite à demi ? L’arbre est-il meilleur ? A-t-il plus de mérite ?

Présent flou, avenir incertain et les célébrations circonstancielles sans but réel et sans influence effective sur le vécu de la femme ,est un point d’interrogation pour beaucoup de femmes ! La fête de la femme n’est qu’un slogan creux. Il n’octroie aucun droit à la femme.

De plus ,cette demi-journée(tranche de 06 heures offerte à la femme),et qu’on a tendance à folkloriser n’exprime pas les aspirations de la femme dans sa globalité. Qu’en est-il de la femme au foyer ? Même cette demi journée ne lui est pas accordée…

Pour de nombreuses femmes, la journée du 08 Mars finit avec la fin des festivités de l’après- midi de la même journée. Seuls les chants et les danses sont mis en exergue : jamais il n’est question de la relation homme-femme, de l’égalité des chances entre les deux sexes, du droit au travail et à la responsabilité, de la vie conjugale…rien de tout ça ! On dirait que l’on a peur de « déroger » aux normes préétablies sur mesure par « erridjal ».

Pour d’autres femmes encore, le constat est amère car la situation de la femme Algérienne est toujours inquiétante à plus d’un titre :même les plus insignifiants droits chèrement payés au cours de notre histoire récente, semblent perdus ces dernières années.

Ce qui désespère ces femmes de voir leurs conditions s’améliorer tant que le code de la famille est toujours là pour dire à la femme qu’elle est mineure, et objet de plaisir, tant que les pouvoirs sont entre les mains des hommes, et tant que la femme est tenue à l’écart des décisions qui engagent toute la société…

Aux hommes ,les femmes leur reprochent de bafouer leur droits( en tant qu’épouses, sœurs, mères…),de les exploiter et de les rejeter dans tous les domaines de la vie, de ne pas voir que cette femme lui a donné la vie !

A l’adresse de l’homme, les femmes Algériennes ne cessent de se poser la question de savoir « est-ce une tare que d’être du sexe faible ? Si oui, que dira-t-il de Lala Fadhma N’Soumeur qui a fait la guerre entre 1852 et 1857 ? de Hassiba Benbouali qui a lutté entre 1954 et 1957 contre l’occupant français, de la Kahina l’épopée de son époque ? de Taous Amrouche l’artiste –écrivain, de Hanifa et Chérifa qui ont chanté la souffrance et la liberté ? La femme était à la fois guerrière, artisane, artiste et écrivain…elle avait rempli tous les rôles !

Pourtant, au tout début du « Hirak », la femme a été ce « carburant pacifique » qui a donné de l’énergie à tout un peuple à la recherche de sa liberté!

En cette journée- symbole qui interpelle encore une fois toutes les consciences, que l’Algérienne, plus que toute autre femme de par le monde moderne, subit une double exclusion dans la cellule familiale et en société en général, il nous parait opportun de lui dédier, en hommage à tous les sacrifices consentis à travers l’histoire, ces quelques lignes de l’écrivain Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature ,qui résument l’importance de la femme dans la vie de l’homme, cause de son aliénation :

«Je ne pourrai pas comprendre ma vie, telle qu’elle est, sans le rôle qu’y ont joué les femmes. J’ai été élevé par ma grand-mère et de nombreuses tantes qui se sont beaucoup occupées de moi, et par des servantes qui m’ont apporté des instants de grand bonheur dans mon enfance…J’ai appris à lire avec une institutrice très belle, très gracieuse, très intelligente ; Si j’ai aimé l’école, c’est à cause d’elle.

Dans ma vie, il y a toujours eu une femme qui m’a conduit par la main dans les ténèbres d’une réalité qu’elles comprennent mieux que les hommes. A la longue , c’est presque devenu une superstition :je sens qu’il ne peut rien m’arriver de mal lorsque je suis entouré de femmes. Elles me donnent un sentiment de sécurité sans lequel je n’aurai pu réaliser tout ce que j’ai fait dans ma vie :en particulier, je n’aurai pas pu écrire…

Les hommes partaient à la guerre avec une carabine, sans savoir ou ils allaient, sans la moindre idée du moment où ils reviendraient et, bien entendu, sans se soucier de ce qui se passerait chez eux. Ils savaient que les femmes allaient se charger de tout, même de former les hommes qui remplaceraient ceux tombés à la guerre ; cela, sans autres ressources que leur propre force et leur imagination. Elles étaient comme ces mères grecques qui saluaient le départ de leurs hommes pour la guerre : Reviens avec ton bouclier ou sur ton bouclier. Autrement dit, vivant ou mort, mais jamais vaincu. »

Simplement, sans détour, c’est cela la femme.

Alors, les femmes pourraient-elles, un jour, espérer le changement de la condition féminine dans notre pays, en voyant un jour une femme ministre de la justice, des affaires étrangères, présidente de l’APN ou même présidente de la République ?

Quand est-ce que se concrétisera le rêve fou des femmes Algériennes d’acquérir l’unique Droit qui consiste en la construction de la citoyenneté d’où découleront toutes les revendications de la femme Algérienne et en premier lieu le droit au respect en tant qu’être humain à part entière ?

Le jour où l’on vivra dans un état de droit. A ce moment là, l’Algérienne sera reconnue et respectée.

C’est utopique peut être, mais l’utopie laisse au moins rêver ,surtout après tout ce qu’a montré au monde entier la femme algérienne depuis cet historique 22 février 2019!

 

Dr Lakhdar AMOKRANE
Premier secrétaire et membre du conseil politique de Jil Jadid